jeudi 14 novembre 2024 à 18h
Scientifiques et politiques alimentaires : deux récits irréconciliables ?
Conférence-débat d'Ève Fouilleux
Directrice de recherche au CNRS, chercheuse associée au CIRAD « politiques publiques et agriculture«
Comment se nourrir durablement dans un monde qui se réchauffe et où la biodiversité s'effondre ? Comment produire dans un monde où il fera trop sec, trop chaud, où les épisodes climatiques violents se multiplieront et où il n'y aura plus d'insectes pour se charger de la pollinisation (phénomènes dont la production agricole et alimentaire est elle-même en grande partie responsable) ?
Comment faire évoluer les manières de manger de manière à limiter l'explosion des maladies liées à l'alimentation (trop grasse, trop sucrée, trop ultra-transformée, ce qui se traduit par des taux d'incidences alarmants en matière de maladies cardiovasculaires, obésité, diabète, cancers). Ces questions terrifient littéralement les scientifiques qui y travaillent. Pourtant, si elles sont plus souvent abordées qu'il y a encore quelques années, elles ne sont pas au cœur du débat politique et médiatique, ni des politiques publiques. C'est le moins qu'on puisse dire. La crise agricole de l'hiver dernier s'est même soldée par un quasi-total détricotage des quelques mesures de politiques publiques, qui cherchaient à protéger la biodiversité en zone agricole et à réduire l'usage des pesticides. Un récit opposant écologie et agriculture a à nouveau été imposé balayant les quelques avancées, pourtant déjà minimes, obtenues de haute lutte dans les années précédentes.
Comment comprendre le paradoxe entre l'urgence constatée par les scientifiques et l'aveuglement total des politiques agricoles et alimentaires qui continuent de promouvoir chimie, productivisme et exportations ?
La conférence d'Eve Fouilleux reviendra d'abord sur les constats des dégâts multiples du système alimentaire industriel, puis sur l'existence indiscutables de solides alternatives écologiques, validées tant sur le terrain, que scientifiquement. Elle expliquera ensuite pourquoi ces alternatives sont quasiment non considérées par les politiques publiques, qui continuent de soutenir, à grand renfort d'argent public, le système alimentaire industriel. Au-delà des récits, elle reviendra sur les effets concrets des politiques publiques concernées ainsi que sur les stratégies mises en œuvre par un certain nombre d'acteurs pour ne surtout pas qu'elles changent.